Risque de l’acte anormal de gestion lors de la cession des titres d’une société holding

Le schéma est classique : par le biais de sa holding, un entrepreneur cède les titres de sa société opérationnelle à un tiers. Cette cession est traitée fiscalement de manière classique et la holding acquitte l’impôt qu’elle doit sur la plus-value. L’entrepreneur se dit alors qu’il peut dormir tranquille et commence à imaginer de nouveaux projets.

L’administration fiscale trouble parfois sa quiétude. Elle peut, en effet, se pencher sur l’acte de cession des titres et regarder comme anormal le prix de cession en établissant l’existence un écart significatif avec la valeur vénale (CE plén. 21 décembre 2018 n°402006). En résumé, selon l’administration, l’entrepreneur cédant aurait fait un cadeau au cessionnaire. Il peut éventuellement s’en sortir en démontrant qu’il y aurait une contrepartie à cette valeur minorée. Dans le contraire, l’administration rehaussera le bénéfice imposable à hauteur de l’écart entre la valeur figurant dans l’acte et ce qu’elle considère comme la valeur vénale. L’entrepreneur devra alors s’engager dans un débat, souvent long et technique, sur ce qu’il faut retenir comme valeur vénale.

Pour que le rehaussement puisse se maintenir, il faut que l’écart soit considéré comme significatif. En effet, la valorisation de titres est une matière complexe et les marges d’appréciation sont multiples. Un écart minime ne peut être considéré comme un acte anormal de gestion.

La jurisprudence du Conseil d’Etat ne fixe pas de seuil en deçà duquel un écart ne pourrait pas être considéré comme significatif.

Toutefois, dans les conclusions du rapporteur public, Laurent Olléon, en 2009 était apparu un seuil minimal de 20 %, ce qui a fait figure de règle pratique non écrite.

Dans une décision récente du 7 avril 2023 (n°466247, min. c/Sté Crédit Agricole), le Conseil d’Etat considère que ce seuil de 20 % n’a pas vocation à s’appliquer.

Dans cette affaire, la Cour administrative d’appel avait considéré que la différence entre la valeur vénale des titres et le prix de cession convenu s’établissant à 14,1 %, compte tenu de l’aléa inhérent à toute méthode d’évaluation de titres non cotés et de l’absence de circonstances particulières à l’espèce, cet écart de prix ne pouvait être regardé comme présentant un caractère significatif.

Le Conseil d’Etat annule cette décision et considère, qu’au regard des circonstances de l’espèce (la société dont les titres étaient cédés n’avait plus d’activité et son actif était composé de trésorerie), l’écart de 14,1 % doit être considéré comme significatif.

C’est donc au cas par cas, qu’il faut déterminer si un écart est significatif ou non. Ici, le juge administratif considère qu’il n’y pas beaucoup de marge d’appréciation sur la valorisation de cette société qui est une sorte de « tirelire » pour reprendre les termes de la rapporteure publique Céline Guibé.  

Si on voit les choses positivement, cela signifie aussi qu’un écart de plus de 20 % peut être considéré comme non significatif si les conditions d’appréciation de la valeur des titres sont objectivement complexes.

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